

Ă mesure que le Forum Ă©conomique mondial (WEF) propose une refonte en profondeur des modĂšles Ă©conomiques, sociaux et politiques traditionnels â Ă travers des projets tels que le Great Reset ou la « transformation systĂ©mique » â la question des droits sociaux fondamentaux se pose avec une acuitĂ© renouvelĂ©e. Les classes les plus vulnĂ©rables, dĂ©jĂ fragilisĂ©es par la mondialisation, lâautomatisation et les restrictions budgĂ©taires, risquent dâĂȘtre les grandes oubliĂ©es de cette modernisation technocratique. Quelles garanties concrĂštes seront (ou ne seront pas) mises en place pour prĂ©server lâaccĂšs au logement, Ă la santĂ©, Ă lâĂ©ducation et Ă la dignitĂ© Ă©conomique dans un tel cadre ?

Le glissement sĂ©mantique et juridique opĂ©rĂ© par les instances transnationales, sous lâimpulsion du WEF, transforme les droits sociaux en accĂšs technologiques sous conditions.
Exemples concrets :
âą LâaccĂšs Ă des aides sociales via des portails numĂ©riques centralisĂ©s (e-gouvernance)
⹠La santé connectée accessible selon des scores de comportement ou des passeports sanitaires
âą LâĂ©ducation en ligne dĂ©pendante de la possession de matĂ©riel, de connectivitĂ© et de compĂ©tences numĂ©riques
Ainsi, les plus fragiles se retrouvent structurellement dĂ©savantagĂ©s dans un systĂšme qui exige des ressources et des conformitĂ©s quâils ne peuvent garantir en continu.

Dans lâarchitecture promue par le WEF, les grandes entreprises technologiques et les partenariats public-privĂ© deviennent les principaux garants des « droits de demain ».
Or, ces entitĂ©s ne sont ni Ă©lues, ni redevables devant le peuple. Elles pilotent des plateformes dâallocation de services selon des critĂšres dâefficacitĂ©, de performance et de rentabilitĂ©, et non selon une logique dâĂ©galitĂ© rĂ©publicaine.
Le rĂŽle de lâĂtat se rĂ©duit Ă un arbitre technicien, tandis que la puissance publique sâefface derriĂšre les interfaces privĂ©es.

Dans un systĂšme indexĂ© sur des donnĂ©es personnelles et environnementales (empreinte carbone, historique bancaire, donnĂ©es de santĂ©), les aides pourraient ĂȘtre distribuĂ©es selon une logique de « mĂ©rite algorithmique ».
Ceux qui sortent du cadre â par choix ou par contrainte â pourraient voir leurs droits restreints, suspendus, voire supprimĂ©s. On passe ainsi de lâuniversalitĂ© des droits Ă leur conditionnalitĂ© comportementale.

Les documents du WEF Ă©voquent souvent des principes comme « lâinclusion », la « rĂ©silience sociale » ou la « justice Ă©quitable par le numĂ©rique ». Mais ces garanties sont :
âą DĂ©pourvues de valeur juridique contraignante
⹠Définies dans un cadre non démocratique (think tanks, consortiums privés)
⹠Formulées de maniÚre floue, laissant place à une interprétation opportuniste par les opérateurs du systÚme
Il ne sâagit pas de droits opposables, mais de promesses Ă gĂ©omĂ©trie variable.

Les réformes structurelles impulsées par le Forum économique mondial et ses alliés ne prévoient à ce jour aucune garantie solide, universelle et démocratiquement validée pour protéger les droits sociaux fondamentaux des plus fragiles.
Ă lâĂšre de la donnĂ©e, du contrĂŽle algorithmique et de la financiarisation des services publics, le risque est clair : que la solidaritĂ© rĂ©publicaine soit dĂ©mantelĂ©e au profit dâune gestion technicienne de la pauvretĂ©, calibrĂ©e par des entitĂ©s privĂ©es hors de portĂ©e du suffrage populaire.
ProtĂ©ger les droits sociaux impose de repolitiser la question du bien commun, de rĂ©affirmer la place de lâĂtat comme garant de la justice sociale, et de refuser toute externalisation technocratique de la dignitĂ© humaine.