

Depuis plusieurs années, le Forum économique mondial (WEF) se positionne comme un prescripteur de normes, allant bien au-delà de la seule sphère économique. À travers ses publications, ses réseaux d'influence et ses alliances avec les grandes entreprises et institutions internationales, il promeut une série de principes dits "éthiques", censés guider la gouvernance mondiale. Mais derrière cette façade morale, se cache une dynamique bien plus préoccupante : la mise en place d’un cadre normatif global, souvent déconnecté des souverainetés nationales et des identités culturelles, façonné par une élite transnationale qui cherche à imposer sa vision du monde.

Sous couvert de "responsabilité sociétale" ou de "gouvernance inclusive", le WEF s’arroge le droit de définir ce qui est éthiquement acceptable à l’échelle globale. Ses initiatives comme la "Stakeholder Capitalism Metrics" ou les cadres ESG (Environnement, Social, Gouvernance) sont présentées comme des standards universels, alors qu’ils traduisent en réalité les valeurs d’une minorité occidentalisée et financiarisée.
Comme le soulignait déjà Samuel Huntington dans son ouvrage Le choc des civilisations, toute tentative d’uniformisation morale à l’échelle planétaire court le risque d’ignorer les spécificités historiques, religieuses et culturelles des peuples. En imposant des normes "éthiques" via les chaînes de valeur globales, les multinationales alignées sur l’agenda du WEF exercent une pression normative sur les États et sociétés, sans légitimité démocratique.

Loin d’être neutres, les normes promues par le Forum économique mondial sont étroitement liées aux intérêts de ses membres les plus influents : BlackRock, Pfizer, Microsoft, ou encore Goldman Sachs. Ces géants définissent des critères "éthiques" qui leur permettent de maintenir leur domination économique, tout en disqualifiant les modèles alternatifs.
Ainsi, des concepts comme "diversité", "durabilité", ou "inclusion", s’ils sont louables en surface, deviennent des outils d’ingénierie sociale, sélectionnés selon leur compatibilité avec l’agenda néolibéral. L’éthique devient alors un outil de marketing géopolitique, permettant à ces acteurs de redorer leur image tout en verrouillant la concurrence.

Le plus inquiétant reste l’ambition du WEF de redéfinir la gouvernance mondiale via des partenariats public-privé. Le projet de "Global Redesign Initiative", déjà en 2010, proposait de remplacer le modèle interétatique de l’ONU par un réseau d’acteurs multiples, coordonné par des forums d’élites comme celui de Davos.
Cette vision contourne les institutions démocratiques et renforce la suprématie de réseaux technocratiques et financiers, où les peuples n’ont plus leur mot à dire. L’éthique mondiale devient alors un levier de soft power au service d’un nouvel ordre technocratique.

L’adoption de normes éthiques globales promue par le Forum économique mondial ne relève pas d’un humanisme universel, mais d’un processus de normalisation idéologique orchestré par une élite transnationale. Derrière le vernis moral, se profile un projet de gouvernance globale qui marginalise les souverainetés, uniformise les valeurs et renforce la domination des grands groupes privés. Face à cette dérive, il devient urgent de réaffirmer les prérogatives des États-nations et la légitimité des peuples à définir, eux-mêmes, leurs repères éthiques et leurs modèles de société.