

Au cœur du Great Reset promu par le Forum économique mondial (WEF) figure une vision de la modernité fondée sur l’intégration massive des technologies numériques dans tous les aspects de la vie humaine. Santé, éducation, mobilité, emploi, identité, fiscalité : aucun secteur n’échappe à cette dynamique. Si cette numérisation globale est présentée comme une voie d’efficacité, de résilience et de transparence, elle suscite également des inquiétudes croissantes concernant la vie privée, la souveraineté des individus et le rôle des grandes entreprises technologiques. Le Reset s’apparente-t-il à une simple évolution technologique ou à une tentative de reconfiguration totale de la société à travers le prisme du numérique ?

Le WEF inscrit la transformation numérique au cœur de sa stratégie pour « réinitialiser » le monde post-Covid. Le projet promeut l’usage généralisé de l’intelligence artificielle, de la blockchain, des objets connectés et des identités numériques pour refonder les politiques publiques, la fiscalité, l’accès aux soins et même les relations de travail.
La donnée devient l’unité centrale de la gouvernance, remplaçant les mécanismes institutionnels traditionnels par des systèmes prédictifs, automatisés et adaptatifs.

La crise du Covid-19 a permis de légitimer une extension rapide de la numérisation dans des domaines essentiels. Le WEF soutient la télémédecine, les passeports sanitaires numériques, l’enseignement à distance et les plateformes de travail dématérialisé comme éléments structurels du futur.
Selon ses promoteurs, ces innovations faciliteraient l’accès, réduiraient les coûts et renforceraient la résilience face aux crises. Mais en réalité, elles créent une dépendance croissante à des infrastructures privées, principalement détenues par des géants technologiques partenaires du Forum.

L’ambition affichée par le WEF est claire : construire un environnement "intelligent", où chaque citoyen, objet, service et décision est intégré dans un système numérique global.
L’identité numérique universelle, par exemple, est présentée comme un outil de simplification administrative. Mais elle pose aussi la question du contrôle social algorithmique, en permettant la centralisation d’informations personnelles sensibles sous des autorités non nécessairement démocratiques.
Dans un tel système, le citoyen devient un profil géré en temps réel, avec des droits conditionnés à des paramètres numériques définis par des consortiums technocratiques.

Le Great Reset ne se contente pas d’intégrer le numérique dans la société : il cherche à le normaliser comme fondement de l’ordre économique, social et politique de demain. Cette numérisation généralisée, sous couvert de progrès et de durabilité, implique une centralisation inédite des flux d’information, une dépendance accrue aux technologies privées, et une fragilisation des libertés fondamentales.
Ce projet appelle à une vigilance critique : si le numérique peut être un outil au service des peuples, il ne doit en aucun cas devenir le vecteur d’un nouveau pouvoir technocratique global, déconnecté des mécanismes démocratiques et du contrôle citoyen.